L’outil numérique semble considéré comme un sujet périphérique de l’activité des professionnel.les qui expriment des attentes sur d’autres registres que le numérique. Pour autant, le déploiement des technologies numériques est bien réel et répond à une orientation stratégique qui vise la modernisation du système de santé.
L’introduction du numérique s’opère dans des contextes souvent dégradés et les projets de changement s’empilent dans un temps court.
Les projets de e-santé s’intègrent bien souvent dans des organisations pré-existantes, mais laissent peu de place aux professionnels pour débattre de leurs finalités. Bien souvent ils s’inscrivent dans des projets plus globaux et institutionnels qui cherchent à répondre à un objectif de mutualisation des moyens et des ressources sans toutefois laisser la place aux structures pour les intégrer et les conduire. Cela ne permet pas véritablement aux organisations et aux professionnels de s’en saisir.
Notre exploration permet de soulever des problèmes de petite ou plus grande ampleur qui impactent la fluidité de la prise en charge et les conditions de travail. C’est cette exploration qui permet de façon opportune de rendre compte de ces problèmes, sans quoi ceux-ci ne s’exprimeraient pas directement par les professionnels. Mais est-il possible pour eux de les exprimer ? Existe-t-il des espaces, des moyens ? Le sujet des conditions de travail entre peu dans le scope au moment de l’intégration des technologies numériques ou dans la vie courant des organisations, masqué par celui de la qualité des soins.
Notre exploration permet de montrer que l’introduction des technologies numériques opère des changements sur les pratiques professionnelles, le contenu du travail, son organisation avec des effets ambivalents en matière de conditions de travail. À ce titre, cette transition numérique et les projets qui la concrétisent justifieraient d’être considérés comme des objets de dialogue social. Or, nous avons observé peu ou pas de saisie de ces sujets dans le cadre du dialogue social. La gouvernance des projets s’en trouve éloignée du terrain et des professionnels et les conditions peu réunies pour que les représentants du personnel puissent s’en emparer. L’exercice est rendu d’autant plus difficile dans un contexte où bon nombre de projets numériques impliquent un territoire entier et/ou différents corps de métier.